Cerveau & Psycho : Dans la tête d’un surdoué – France Culture : Enfants à Haut Potentiel, un phénomène de société
21 octobre 2021Le magazine Cerveau&Psycho n° 136 du mois d’octobre 2021 propose un dossier intitulé « Dans la tête d’un surdoué. Que disent les neurosciences sur le haut potentiel intellectuel ? ».
Le dossier aborde le Haut Potentiel Intellectuel sous trois aspects, biologique, psychologique et éducatif et a pour but de « représenter l’intelligence pour ce qu’elle est ».
Les auteurs des différents articles sont :
- Nicolas Gauvrit, psychologue du développement et chercheur en sciences cognitives au laboratoire Chart, à l’Ecole pratique des hautes études, à Paris
- Nathalie Clobert, psychologue clinicienne et hypnothérapeute, formatrice au sein d’organismes d’aide au développement de l’enfant
- Franck Ramus, directeur de recherche au CNRS, au Laboratoire de sciences cognitives et psycholinguistiques EHESS/ENS/CNRS, à Paris
Le 1er article, consacré à l’aspect psychologique, rappelle la définition du Haut Potentiel Intellectuel (Intelligence supérieure à la moyenne avec un score de QI dépassant 130), ce qui concerne 2,3 % de la population. Le Haut Potentiel est défini comme un « talent en germe » qui ne peut se développer que dans un environnement favorable -scolairement notamment – et cela au prix d’une discipline de travail.
Le 2ème article apporte un éclairage sur la physiologie du Haut Potentiel. On y apprend que les personnes HPI ont un cerveau plus volumineux, et plus puissant que le reste de la population. La puissance proviendrait de connexions neuronales plus fortes qui favoriseraient le dialogue entre différentes zones du cerveau.
Le dernier article, consacré à l’éducatif, retrace l’interview de Jacques Grégoire, docteur en psychologie et professeur à l’Université catholique de Louvain (Belgique), spécialiste du diagnostic de l’intelligence et des troubles de l’apprentissage. Jacques Grégoire fait le constat d’un manque de connaissance des enseignants sur le Haut Potentiel, ce qui les laisse démunis pour accompagner les enfants concernés favorablement en classe. Il évoque des pistes comme le saut de classe, le mentorat.
En parallèle, l’émission « Être et savoir », animée par Louise Tourret, diffusée sur France Culture le 18 octobre 2021 était consacrée aux enfants à Haut Potentiel.
Trois invités participaient à l’émission :
- Jérôme Pellissier, psychothérapeute, docteur en psychologie, chercheur en psycho-sociologie, auteur de La Fabrique des surdoués (Dunod, 2021)
- Anne Bargiacchi, médecin psychiatre, elle a exercé 10 ans à l’Hôpital Robert Debré au sein du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et publie avec Alexandre Hubert A haut potentiel, précoce, dans la collection L’Enfance en questions (Nathan, 2021)
- Nicolas Gauvrit, enseignant chercheur en sciences cognitives à l’Université de Lille, chroniqueur pour la revue Cerveau et psycho, il a codirigé avec Nathalie Clobert Psychologie du haut potentiel -Comprendre, identifier, accompagner (De Boeck supérieur, 2021).
L’émission « Être et savoir » débute par une interview de Franck Ramus relative à la mesure de l’intelligence.
Franck Ramus définit l’intelligence générale chez l’enfant comme une « moyenne » de toutes les fonctions cognitives de l’enfant. Un enfant à Haut Quotient Intellectuel (HQI) ou à Haut Potentiel Intellectuel (HPI) est un enfant dont l’intelligence générale est élevée.
Au travers de l’émission, on comprend que c’est le potentiel rôle « prédictif » de la valeur du Quotient Intellectuel qui est interrogé, notamment au travers de sa mesure, puis de son utilisation.
Aujourd’hui, la mesure de l’intelligence est réalisée au travers d’un test réalisé par un psychologue. Pour les enfants de 6 à 16 ans, le test utilisé est le WISC (Wechsler Intelligence Scale for Children).
Des échanges entre les différents participants, on peut retenir que :
- Le QI ne définit pas un « destin gravé dans le marbre » car le contexte environnemental et éducatif joue un grand rôle dans l’usage du Haut Potentiel. Le Haut Potentiel n’enferme pas dans une trajectoire, ni celle du prodige, ni celle de l’échec scolaire.
- Les tests de QI ont des limites car ils donnent majoritairement des informations sur les capacités cognitives utilisées dans le cadre scolaire. Jérôme Pellissier considère que cela donne une vision restrictive de l’intelligence, négligeant, par exemple, la créativité ou les grandes capacités sportives.
- Le nombre de tests de QI est en augmentation car on est à une époque où les parents se préoccupent davantage de leurs enfants, surtout lorsqu’ils présentent un comportement hors de la « norme ». C’est en cela que le test de QI doit être fait lorsqu’il y a un signe d’appel et qu’il doit servir à mieux accompagner l’enfant, à l’aider. Le test de QI doit être fait dans le cadre d’une évaluation globale, prenant en compte le fonctionnement de l’enfant et son environnement, si l’on veut pouvoir aider l’enfant.
- Le rôle de l’éducation, de l’École est primordial : dans les années 70, le saut de classe se faisait plus facilement qu’aujourd’hui. Sous le prétexte d’égalité, il est moins fréquent aujourd’hui alors que les enfants à haut potentiel ont besoin de stimulation et de mise au travail.
On ne peut pas demander à un enfant, sous le prétexte qu’il est intelligent, de devoir attendre les autres.
- La réalisation du potentiel n’est pas « obligatoire ». Elle doit prendre en compte les besoins de chacun. La réalisation du Haut Potentiel ne passe pas nécessairement par la réalisation d’études brillantes. Reconnaître et accompagner un potentiel est différent de le forcer. Cela passe par l’accompagnement des besoins en fournissant à l’enfant l’environnement et l’apprentissage adaptés.
- La vision du Haut Potentiel en France est différente de celle trouvée aux Etats-Unis ou au Canada. Même si une inflexion semble s’engager, en France, le Haut Potentiel est encore associé à la notion de trouble et de souffrance. Ailleurs, le Haut Potentiel est majoritairement considéré comme un atout, pour les enfants concernés ou pour la société.
Le dossier de Cerveau&Psycho et l’émission de France Culture ont en commun de pointer combien il est complexe d’être un enfant au fonctionnement différent tant dans la culture française que dans son système éducatif.
L’information, la formation, scientifiques, sont impératives pour faire évoluer les pratiques et les mentalités.
La conclusion de Jacques Grégoire est en cela pertinente :
« Il est temps de remettre à plat la question de l’intelligence et de la différence. C’est un beau défi à relever pour nous tous ».
Les liens vers l’émission et le magazine :
https://www.franceculture.fr/emissions/etre-et-savoir/hpi-un-phenomene-de-societe
https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/neurosciences/cerveau-psycho-n0136-21906.php